MOPGA, plus de 50 projets pour le changement global, y compris climatique

Institutionnel

Quatre ans après le lancement de l’appel à projet Make Our Planet Great Again, un premier bilan de mi-parcours des plus de 50 projets initiés à cette occasion s’est tenu à Strasbourg.

« Le défi qui nous attend est de trouver des stratégies pour atténuer l'effet des changements globaux et du dérèglement climatique, et cette réflexion nécessite de transformer les connaissances scientifiques en actions et solutions pour nos sociétés », énonçait Antoine Petit, président-directeur général du CNRS lors de l’ouverture de la conférence scientifique de mi-parcours du Programme franco-allemand « Make our planet great again » (MOPGA) qui s’est tenu du 23 au 24 novembre 2021 à l'École de Chimie, polymères et matériaux à Strasbourg, quelques jours à peine après la fin de la COP261 .

Lancé en 2017 par le président de la République Emmanuel Macron suite à la décision subite des États-Unis de quitter l’accord de Paris2  – texte dont l’ambition est de limiter le réchauffement à 1,5 °C à l'horizon 2100 - le programme MOPGA invitait « tous les scientifiques, ingénieurs, entrepreneurs, citoyens engagés » déçus – voire pénalisés – par cette décision à venir travailler en France sur des solutions concrètes pour le changement global et le climat.

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Antoine Petit, président-directeur général du CNRS lors de la conférence de mi-parcours Make Our Planet Great Again. © MOPGA

Le CNRS a été désigné pour piloter l’animation scientifique du programme au plan national, ainsi qu’à l’échelon européen avec ses collègues du Deutscher Akademischer Austausch­dienst (Daad, Office allemand d’échanges universitaires) - l’Allemagne ayant rejoint l’initiative lors du sommet franco-allemand de juillet 2017 et mis sur pied un programme jumeau. Depuis son lancement, le programme MOPGA a généré plus de 1000 manifestations d’intérêt, 343 candidatures éligibles au total pour 43 lauréats provenant du monde entier accueillis en France et 13 en Allemagne (voir encadré).

Une stratégie gagnant-gagnant

Pour Antoine Petit, il s’agit bien d’une « stratégie gagnant-gagnant, car le programme a invité des scientifiques de haut niveau à venir développer des projets de recherche de haut vol dans les laboratoires d’excellence de nos deux pays ». Largement impliqué, avec plus de 2000 chercheurs et chercheuses œuvrant pour une meilleure compréhension des mécanismes qui régissent l’écosystème et le climat de la planète et premier contributeur de savoir mondial du GIEC3 , le CNRS a reçu au sein de ses laboratoires de nombreux scientifiques (voir encadré témoignages). « Car le CNRS, au travers de programmes tels que MOPGA, tente de réduire le fossé entre la science, les affaires, la société civile et la politique en produisant des recherches orientées vers des solutions », ajoute Antoine Petit, rappelant que le changement climatique était l'un des six grands défis sociétaux inscrit dans le Contrat d’objectif et de performance (COP) 2019-2023 de l’organisme.

Frédérique Vidal, ministre de l’Éducation supérieure, de la Recherche et de l’Innovation (MESRI), a quant à elle souligné dans un message filmé pour la conférence qu’il fallait « donner envie aux scientifiques de venir y travailler et d’y rester », rappelant que la France souhaitait être « un leader » dans le domaine de la lutte contre le dérèglement climatique. Coté Allemagne, un sentiment d’urgence sur la question climatique portée notamment par Anja Karliczek, ministre fédérale allemande de l’Éducation et de la Recherche : « La COP26 nous a montré qu’il y avait encore du chemin à parcourir. Nous avons besoin d’initiatives fortes en Europe alors que les feux et les inondations de l’été dernier ont témoigné de ce qui pouvait nous attendre. Il vaut la peine de se battre ».

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Christina Richards, lauréate du programme MOPGA allemand a donné le discours d'ouverture. © studiof2c / fabien de chavanes

Bilans et complémentarités

Les deux journées de cette conférence, imaginée comme une plate-forme d'échanges scientifiques interdisciplinaires sur le changement global, a mis en avant la diversité des plus de 50 projets MOPGA illustrant le caractère multidimensionnel et les problèmes complexes des changements globaux auxquels la communauté mondiale est confrontée. Sous le slogan « Évaluer, comprendre, atténuer le changement mondial », la conférence a structuré les projets des lauréats autour des grandes questions liées au changement global et le climat : de la compréhension de l'histoire du climat de la Terre depuis des temps lointains – avec la modélisation géodynamique des marqueurs du niveau de la mer au cours des périodes chaudes géologiques passées ; aux processus atmosphériques actuels et futurs – avec le statut et les menaces des forêts tropicales ; à la réponse de la biodiversité et des écosystèmes – avec l’impact du changement climatique sur les espèces sauvages, y compris les systèmes couplés Homme-nature avec l’adaptation des cultures au changement climatique dans les zones tropicales arides ; jusqu’aux solutions allant du développement de technologies de pointe aux stratégies d'adaptation politiques et sociales, telles que la fabrique de médicaments verts ou encore la création de solutions basées sur la nature pour l'adaptation au changement climatique dans les Alpes.

Selon Stéphane Blanc, directeur de l'Institut écologie et environnement (INEE) du CNRS et responsable de l’animation du programme MOPGA, « le niveau des présentations – entre un format TED Talk et Ma Thèse en 180 Secondes (MT 180) – était tout simplement exceptionnel. Cela traduit sans nul doute le protocole de sélection des projets MOPGA assez unique, à savoir une pré-sélection sur CV des candidats réalisée par le CNRS, puis une sélection des projets par l’ANR. Ce niveau d’excellence incontestable explique les succès successifs des lauréats et lauréates au concours de la fonction publique dans le domaine de la recherche à ce jour ».

Autant de projets et d’initiatives qui ont su faire du programme MOPGA une réussite. Un succès qui a également permis la création d’appels à projet annuels MOPGA portés par Campus France à destination des jeunes chercheurs et chercheuses étrangers (voir encadré).

 

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Les lauréats et participants à la conférence de mi-parcours Make Our Planet Great Again. © studiof2c / fabien de chavanes 
  • 1La 26e Conférence des Parties (COP) s’est déroulée du 1er au 12 novembre à Glasgow.
  • 2Les États-Unis ont réintégré l’accord de Paris en février 2021.
  • 3Créé en 1988, le GIEC vise à fournir des « évaluations détaillées de l’état des connaissances scientifiques, techniques et socio-économiques sur les changements climatiques, leurs causes, leurs répercussions potentielles et les stratégies de parade. »

43 projets financés en France

Doté d’un budget de 30 millions d’euros1  en France par le Secrétariat général pour l'investissement (SGPI), le programme MOPGA soutient des projets de 3 à 5 ans sur trois thématiques : les sciences du système Terre et du climat ; le changement climatique et le développement durable ; et les sciences et technologies de la transition énergétique2 . Les projets sont financés jusqu’à 1 M€ pour un chercheur junior (titulaire d’une thèse il y a moins de douze ans) et 1,5 M€ pour un chercheur senior (titulaire d’une thèse depuis plus de douze ans). La première vague de l’appel à projet MOPGA a retenu 32 lauréats et la seconde, réalisée entre 2018 et 2019, 11 lauréats. Soit 43 projets financés en France. La majorité est portée au sein de laboratoires CNRS. Et au total, 21 des lauréats du programme MOPGA résidaient aux États-Unis lors de leur candidature.

  • 130 millions d’euros dotés par l’ANR mais les instituts d’accueil devaient fournir au moins 1€ pour chaque euro de l’ANR.
  • 2Les projets se répartissent à 44 % sur le thème 1, 40 % sur le thème 2 et 16 % sur le thème 3.

Un programme à destination des jeunes chercheurs et chercheuses

Au vu du succès du programme MOPGA, des appels à projet annuels, labélisés MOPGA, initiés par le MESRI et le Ministère des Affaires étrangères et de l’Europe, et coordonnés par Campus France1 , ont été créés en 2018 pour financer des projets à court terme (jusqu’à 12 mois) à destination des étudiants et des jeunes chercheurs étrangers (du master jusqu’au doctorat obtenu il y a moins de 5 ans) pour réaliser des projets sur cinq grands domaines de recherche : les sciences du système terrestre, les sciences du changement climatique et de la durabilité, la transition énergétique, les enjeux sociétaux des questions environnementales, ainsi que la santé humaine, animale et environnementale.

  • 1 Agence française pour la promotion de l’enseignement supérieur, l’accueil et la mobilité internationale.

« MOPGA a permis de renforcer une nouvelle équipe du laboratoire », Samuel Morin, directeur du Centre national de recherches météorologiques

Le Centre national de recherches météorologiques1  (CNRM) a accueilli deux lauréats de la première vague du programme MOPGA, des « projets longs de 5 ans, auxquels est venu s’ajouter un projet court sur 12 mois », explique Samuel Morin qui intervenait lors de la conférence au sujet de l’impact et l’adaptation au changement climatique dans le tourisme hivernal. Ainsi, Virginie Guemas, anciennement chercheuse au sein d’un laboratoire barcelonais et arrivée au CNRM en 2018, a rejoint une équipe sur la modélisation climatique et plus précisément les interfaces océan-banquise dans les régions polaires - où les effets du changement climatique sont amplifiés. « Entre temps, la chercheuse a passé le concours de recrutement du CNRS et obtenu un poste permanent. Son projet MOPGA est ainsi venu accompagner son début de carrière au CNRS. » Le chercheur Philippe Lucas-Picher, de l’Université du Québec, a lui aussi rejoint les rangs du CNRM grâce à l’aventure MOPGA et a ainsi permis de renforcer une nouvelle équipe du laboratoire travaillant sur l’évolution du climat à échelle régionale. « Son projet s’est inscrit dans une stratégie de long terme du CNRM et a accéléré un certain nombre de développements. » De retour dans son Québec natal après avoir été recruté en tant que professeur associé à l’Université du Québec au cours de son projet MOPGA, ce dernier continue néanmoins malgré son départ. Plus récemment, le CNRM a accueilli un projet de 12 mois MOPGA de Miquel Tomas, un jeune chercheur espagnol, sur l’impact du changement climatique sur les ressources hydrologiques.

  • 1CNRS/Météo France.

« Aux États-Unis, les sites web des organismes liés au changement climatique fermaient », Camille Parmesan, chercheuse à la Station d'écologie théorique et expérimentale

Biologiste aux universités d'Austin (Texas) et de Plymouth (Grande-Bretagne), Camille Parmesan, maintenant à la Station d'écologie théorique et expérimentale1  a décidé de répondre à l’appel à projet MOPGA après l’annonce du Brexit et l’élection de Donald Trump coup sur coup. « Aux États-Unis, les sites web des organismes liés au changement climatique fermaient, les scientifiques dont les travaux portaient sur ce thème étaient bâillonnés, les publications étaient empêchées », rapporte-elle. Depuis 2018, la chercheuse américaine développe dorénavant en Ariège ses recherches. Son objectif : mieux comprendre le lien entre changement climatique, la nature et l’humain. « C’est un projet très large qui contient de nombreux mini-projets tels que l’impact du changement de la faune sur les maladies humaines ; la réception des plus jeunes aux questions que soulèvent le changement climatique ; ou encore comment certaines espèces de papillons sont en train de s’adapter au changement climatique. » La chercheuse, qui a passé le concours du CNRS, est dorénavant une chercheuse permanente de l’organisme et compte bien terminer son projet avec de vrais outils pour la protection de la planète.

  • 1CNRS.