Une start-up pour des batteries de plus en plus rapides
Deux ans après la conception du premier prototype de batterie utilisant des ions sodium 1 dans un format industriel standard, la start-up Tiamat est créée pour concevoir, développer et produire cette technologie prometteuse. Celle-ci pourrait en effet pallier certaines limites des batteries lithium-ion, aujourd'hui dominantes, comme la vitesse de recharge, la durée de vie ou le coût de production. Elle pourrait notamment permettre le stockage massif d'énergies renouvelables dites intermittentes (éolienne ou solaire) ou équiper des véhicules électriques. Implantée à Amiens, cette société est issue du Réseau français sur le stockage électrochimique de l'énergie (RS2E 2 ) porté par le CNRS. Elle dispose aujourd'hui de plusieurs dizaines de prototypes fonctionnels, et espère lancer la production à plus grande échelle d'ici 2020.
- 1Pour en savoir plus Consulter le site web
- 2Lancé en 2011 à l'initiative du CNRS et du ministère de l'Education nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, ce réseau regroupe notamment 17 laboratoires de recherche en France, un centre de recherche technologique et d'intégration ainsi qu'un club des industriels (15 entreprises à ce jour). Voir Consulter le site web
En novembre 2015, des chercheurs principalement du CNRS, du CEA et de plusieurs universités françaises 3
, regroupés au sein du RS2E, ont réussi à concevoir le premier prototype de batterie sodium-ion au format « 18650 », un format très répandu dans l'industrie, notamment pour les batteries lithium-ion. S'inspirant directement de ces batteries, il est doté de meilleures performances que celles-ci, notamment en termes d'espérance de vie, de rapidité de charge et décharge. Son principal atout est d'utiliser le sodium, un élément moins coûteux et plus abondant que le lithium (on trouve 2,6 % de sodium dans la croûte terrestre, contre 0,06 % de lithium à peine). De plus, le sodium se trouve partout sur la planète, notamment dans l'eau de mer, sous forme de chlorure de sodium (NaCl) alors que les ressources en lithium sont très localisées dans quelques régions du globe (Argentine, Chili et Bolivie détiennent les deux tiers des ressources mondiales).
La création aujourd'hui de la société Tiamat, dédiée au développement et à la production de ces alternatives au lithium-ion, s'inscrit dans la continuité de ces travaux. Son objectif cependant n'est pas de détrôner les batteries lithium-ion, qui équipent déjà la plupart des appareils électroniques mobiles. Tiamat se positionne sur la puissance et la continuité de service grâce à des batteries endurantes (plus de 10 ans d'espérance de vie contre 3-4 ans pour celles au lithium dans des conditions d'usage continu), des charges et des recharges 10 fois plus rapides. Ces performances ouvrent des possibilités d'utilisation pour des usages aujourd'hui peu exploités ou bien développés avec des technologies peu adaptées, comme le stockage stationnaire (stockage de masse des énergies renouvelables intermittentes, éolienne ou solaire) et le stockage mobile pour des véhicules électriques (les bus rechargeables en fin de ligne par exemple). Tiamat s'intéresse notamment aux flottes de véhicules en location, qui requièrent des temps de recharge courts et nécessitent une continuité de service aux usagers. La technologie sodium-ion permet ainsi d'envisager de nouveaux usages du quotidien, tels des véhicules électriques avec 200 km d'autonomie qui se rechargent en quelques minutes.
Après une phase d'homologation de ces technologies, la société basée à Amiens entend y développer son activité. Forte du soutien du RS2E, elle travaille d'ores et déjà en collaboration avec le tissu d'acteurs académiques et industriels de ce réseau. Un premier pas, avant de pouvoir lancer la production de ces batteries si possible sur le sol français, qui permettrait à la France de prétendre à un leadership dans ces nouvelles solutions de stockage de l'énergie.
L'ensemble de ces travaux de recherche a fait l'objet de plusieurs publications et de brevets déposés par le CNRS et le CEA. Il a bénéficié des soutiens notamment du ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche et de l'Innovation 4
, du CNRS, du CEA, de l'Agence nationale de la recherche (Labex Store-Ex) et de la DGA (Direction générale de l'armement). Le CNRS fait partie des actionnaires de Tiamat.
- 3Huit laboratoires et entités impliqués : six laboratoires français du réseau RS2E (Institut de chimie de la matière condensée de Bordeaux (CNRS), Laboratoire réactivité et chimie des solides (CNRS/Université de Picardie Jules Verne), Centre interuniversitaire de recherche et d'ingénierie des matériaux (CNRS/Université de Toulouse III - Paul Sabatier/INP Toulouse), Laboratoire « Chimie du solide et de l'énergie » (CNRS/UPMC/Collège de France), Institut Charles Gerhardt Montpellier (CNRS/Université de Montpellier/ENSC Montpellier) et Institut de sciences des matériaux de Mulhouse (CNRS/Université de Haute Alsace), Rosa Palacin, chercheuse à l'Institut des sciences des matériaux de Barcelone et le Liten, institut de CEA Tech
- 4Tiamat fait partie des 62 lauréats 2017 du concours national i-Lab d'aide à la création d'entreprises et de technologies innovantes i-Lab, organisé par le ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche et de l'Innovation.