Le centre de recherche international avec l’Université de Tokyo, accélérateur de collaborations
Début octobre 2023, Antoine Petit s’est rendu au Japon, l’un des partenaires internationaux majeurs du CNRS, pour participer, un an après son inauguration, à la réunion de pilotage du centre de recherche international avec l’Université de Tokyo et y lancer un nouveau laboratoire international (International Research Laboratory) en mathématiques.
Du 1er au 3 octobre 2023, Antoine Petit, président-directeur général du CNRS, était en déplacement au Japon, qui compte parmi les principaux partenaires internationaux du CNRS. Un tel voyage a été l’occasion de mesurer l’avancement du nouveau Centre de recherche international1 avec la prestigieuse Université de Tokyo (UTokyo), première institution académique du Japon. Un an à peine après son inauguration, il porte d’ores et déjà ses fruits. En témoigne la signature le 3 octobre par Antoine Petit, aux côtés de Teruo Fujii, président de l’UTokyo, de l’accord-cadre donnant naissance à un nouvel International Research Laboratory2 : le French-Japanese Laboratory of Mathematics and their Interactions (FJLMI). Premier laboratoire international au Japon consacré aux mathématiques, fondamentales comme appliquées, ce laboratoire manifeste, selon son directeur français Michael Pevzner, le succès de « la collaboration franco-japonaise en mathématiques qui, depuis plus de 90 ans, a donné lieu à d'importantes découvertes et a exercé une profonde influence sur les mathématiques modernes ».
La création de ce cinquième laboratoire international avec l’UTokyo – qui accueille à elle seule près de la moitié des 11 laboratoires internationaux au Japon – s’inscrit dans une vague de fond. Depuis 2021, les collaborations scientifiques et les partenariats institutionnels se multiplient avec la première université nippone en nombre de publications. En deux années à peine, trois laboratoires internationaux ont ainsi vu le jour, au rythme soutenu d’un par an : ILANCE3 en 2021 sur la physique des deux infinis, DYNACOM4 en 2022 sur le contrôle ultrarapide des matériaux et désormais FJLMI, qui s’ajoutent aux plus anciens LIMMS5 (1995) dédié aux microsystèmes électromécaniques et JFLI6 (2012) consacré à l’informatique.
Le centre de recherche international, accélérateur de collaborations
Et la vague n’est pas prête de retomber, vu le rôle d’accélérateur des collaborations entre les deux établissements que joue le centre de recherche international depuis sa mise en place l’an passé. Lors de l’inauguration du FJLMI, Antoine Petit se félicite de la rapidité du succès de ce centre de recherche international : « Avec le président Teruo Fujii, nous avons décidé en 2022 de créer ce centre de recherche international pour concrétiser notre dialogue stratégique commencé il y a quelques années. Je suis vraiment surpris par l’impact et la performance de cette structure en seulement un an d’existence ». À l’instar du groupe de travail exploratoire en mathématiques, d’autres groupes pourraient prochainement consolider leurs coopérations, tel le groupe de travail sur l’énergie, actif depuis dix ans et jusqu’alors spécialisé dans les cellules photovoltaïques, qui a défini de nouvelles priorités scientifiques pour l’International Research Project NextPV7 , en recentrant celui-ci sur le couplage photovoltaïque et hydrogène.
- 1Un centre de recherche international est un nouveau dispositif institutionnel qui vise à instaurer un dialogue stratégique ambitieux entre le CNRS et son partenaire académique pour définir leurs intérêts communs et les collaborations leur permettant d’y répondre ensemble, sous la forme de laboratoires de recherche internationaux, de projets de recherche, de réseaux thématiques ou d’autres dispositifs existants ou à développer.
- 2Les laboratoires de recherche internationaux correspondent à des implantations de recherche internationales au sein desquelles des activités de recherche sont menées en commun autour d’axes scientifiques partagés. Ils structurent en un lieu identifié les présences significatives et durables de scientifiques d’un nombre limité d’institutions de recherche françaises et étrangères (un seul pays étranger partenaire). Ces unités ont une durée de cinq ans.
- 3CNRS / Université de Tokyo.
- 4CNRS / Université de Rennes 1 / Université de Tokyo.
- 5CNRS / Université de Tokyo.
- 6CNRS / Université de Tokyo / Sorbonne Université / Université de Keio / National Institute of Informatics de Tokyo.
- 7Porté par le CNRS, l’Université de Bordeaux et l’Université de Tokyo.
Le STS Forum de Kyoto
Dès son arrivée au Japon, Antoine Petit a représenté le CNRS auprès de la communauté scientifique et technologique au Science and Technology in Society (STS) Forum. Depuis presque 20 ans, la ville de Kyoto accueille la communauté scientifique et technologique au sein de ce mouvement mondial de dirigeants de haut niveau dans les domaines de la politique, des affaires et de la recherche et de la formation qui se rencontrent dans l’ancienne capitale impériale, devenue un lieu de science et de technologie de pointe.
Antoine Petit y est intervenu pour animer une table ronde sur les actions pour rejoindre la voie de la durabilité. Partant du constat que nous ne faisons malheureusement que très peu de progrès et que nous sommes toujours sur le même chemin de la non-durabilité, les participants à la table-ronde ont exposé leurs actions concrètes pour y remédier. Pour échanger sur ce sujet majeur et comparer les approches, Antoine Petit était entouré de Michael V. Drake, président de l’Université de Californie, Teruo Fujii, président de l’Université de Tokyo, Masahito Moriyama, ministre japonais de l’Éducation, de la Culture, des Sports, de la Science et des Technologies, et de Marie-Noëlle Semeria, directrice de la technologie chez TotalEnergies.
50 ans de coopérations scientifiques franco-japonaises
À l’image de ces programmes de coopération, c’est vers l’avenir et de futures recherches que se tournent les deux institutions, en vue, pour reprendre les mots de Teruo Fujii, « d'établir des liens plus étroits entre nos deux organisations ». Dans cette optique, trois nouveaux groupes de travail exploratoires ont été proposés par le CNRS et acceptés par l’UTokyo lors de la réunion du 3 octobre : « Data for Earth Observation », qui envisage un premier workshop dès l’an prochain ; « AI for Science & Science for AI », tiré d’un défi du Contrat d’objectifs et de performance 2019 – 2023 du CNRS, qui pourrait viser un partenariat institutionnel avec l’initiative « Beyond AI » de l’UTokyo ; et « Social Sciences », qui s’appuiera sur la Maison franco-japonaise à Tokyo, unité mixte des instituts français de recherche à l’étranger, pour mener des actions locales dès 2024. La jeune recherche franco-japonaise est particulièrement mise à l’honneur au sein de cette dynamique. Ainsi, après le succès des deux premières éditions, un nouveau PhD Joint Program ciblant les thématiques des cinq laboratoires internationaux et des trois groupes de travail exploratoires devrait prochainement voir le jour.
2024 sera l’année du cinquantième anniversaire de la collaboration scientifique franco-japonaise, notamment fêté au sein du FJLMI, dont la conférence inaugurale se tiendra en début d’année. Comme le suggère Antoine Petit, cette année singulière « pourrait être une bonne occasion de mettre en valeur notre coopération particulière, de l'utiliser comme exemple ». En effet, au-delà de la seule UTokyo, le Japon se classe comme le premier partenaire international en nombre de dispositifs institutionnels du CNRS, avec lequel il partage le plus grand nombre de laboratoires internationaux, et le dixième en volume de copublications scientifiques. Et l’attention est réciproque : en 2020, cinq laboratoires français, dont quatre portés par le CNRS et ses partenaires français, avaient été retenus par le programme « Core-to-Core » pour participer à des pôles de recherche de classe mondiale dans des domaines de pointe et d'importance pour le gouvernement nippon, ce qui faisait de la France le deuxième pays, derrière le Royaume-Uni, au classement des pays les plus présents dans ce programme. Une relation spéciale, nourrie d’estime mutuelle et d’une envie de travailler ensemble, semble unir les deux pays. Au regard de son expérience du FJLMI, Michael Pevzner témoigne ainsi que « ce qui a été important, c'est que notre coopération a été réellement féconde, supplantant même la stimulante coopétition, pour s’arrimer à un intérêt mutuel qui se renouvelle ».