Choose CNRS : des opportunités pour les scientifiques étrangers
À travers quatre dispositifs visant les jeunes talents comme les scientifiques de renommée internationale, les chercheurs et chercheuses étrangers sont invités à se tourner vers la France et le CNRS. Directeur général délégué à la science, Alain Schuhl nous explique tout.
En écho au dispositif « Choose France for Science » (voir encadré), le CNRS lance aujourd’hui l’appel « Choose CNRS ». De quoi s’agit-il ?
Alain Schuhl : Dans plusieurs pays, la science est de plus en plus empêchée : des pans entiers de la recherche qui sont sinon interdits, du moins très limités par des coupes budgétaires drastiques, des listes de termes censurés ou des licenciements massifs, des agences responsables de la production et du stockage de données de recherche indispensables à la communauté internationale qui se voient menacées, etc. On pense bien sûr aux États-Unis sous la nouvelle administration Trump, mais c’est aussi le cas par exemple de l’Argentine. Face à cela, le CNRS propose d’ouvrir ses portes aux scientifiques qui ne peuvent plus exercer leur métier là où ils sont.
Il ne s’agit bien sûr pas d’accueillir tout le monde. Nous concentrons nos efforts pour faire venir en France des chercheurs et des chercheuses de très haute qualité, des jeunes scientifiques prometteurs ou des têtes de ponts, qui pourront apporter une vraie valeur ajoutée et enrichir les communautés de recherche françaises. « Choose CNRS » vise ainsi à mieux faire connaître les possibilités pour rejoindre le CNRS à ces scientifiques, avec une communication plus ciblée.
L’idée serait de les faire venir sur le territoire national pour une durée importante, au minimum quelques années et, pourquoi pas, de pérenniser certains. On s’inspire du programme « Make Our Planet Great Again » (MOPGA) lancé par le gouvernement en juin 2017, lors du premier mandat de Donald Trump : nous avions alors fait venir en France une quarantaine de chercheurs et chercheuses, dont près d’un tiers occupent aujourd’hui des postes permanents en France. C’est le cas par exemple de l’américaine Camille Parmesan, spécialiste des effets du changement climatique sur les papillons, arrivée en 2018 via MOPGA et directrice de la Station d’écologie théorique et expérimentale de Moulis1 depuis 2023.
- 1CNRS.
La France accueille les scientifiques
Le Ministère chargé de l’Enseignement supérieur et de la Recherche a annoncé vendredi 18 avril le lancement d’une plateforme sur laquelle les organismes de recherche comme le CNRS, les universités et les écoles pourront déposer leurs projets d’accueil de scientifiques internationaux. « La France entend se positionner comme un lieu d’accueil pour ceux qui souhaiteraient poursuivre leurs travaux en Europe, en s’appuyant sur l’écosystème et les infrastructures de recherche de notre pays. », a-t-il indiqué. Cette plateforme « Choose France for Science » recense en particulier les projets de recherche dans 7 thématiques1 et le programme France 2030 pourra participer au financement des projets.
En savoir plus : https://france2030.agencerecherche.fr/ChooseFranceForScience-2025/accueil.php
- 1La recherche en santé ; Le climat, la biodiversité et les sociétés durables ; Le numérique et l’intelligence artificielle ; Les études spatiales ; L’agriculture, l’alimentation durable, les forêts et les ressources naturelles ; Les énergies décarbonées ; Les composants, les systèmes et les infrastructures numériques
De quels dispositifs peuvent bénéficier les candidats et candidates ?
A.S. : L’appel « Choose CNRS » se décline en quatre niveaux selon la séniorité des scientifiques, dans toutes les disciplines. Les dossiers de candidature sont à déposer sur une plateforme dédiée.
À destination des chercheurs et chercheuses seniors, nous disposons de notre dispositif d’embauche de directeurs et directrices de recherche. En cas de forte demande, nous pourrions envisager de moduler le nombre de postes ouverts au concours. La prochaine campagne pourrait donc intéresser des scientifiques de haut niveau.
Pour des personnes un peu moins avancées en termes de séniorité, le CNRS dispose chaque année d’une cinquantaine de chaires de professeur junior (CPJ). Il faudra inciter les scientifiques étrangers à postuler à ces contrats d’une durée de 3 à 6 ans avec ensuite une possible titularisation, selon la méthode des « tenure track positions » courantes aux États-Unis.
Ensuite, il y a les offres de post-doctorat. Elles pourront séduire les personnes qui viennent de finir leur thèse aux États-Unis ou ailleurs, dans des domaines où les postes et les contrats post-doctoraux se font rares du fait de coupes budgétaires. L’idée est de faire venir ces scientifiques pour quelques années. Cela leur permettra de tisser des liens durables avec les communautés de nos laboratoires, et nous devrions pouvoir en stabiliser certains sur des emplois pérennes.
Enfin, un nouveau dispositif devrait permettre au CNRS d’attirer des scientifiques de très haut niveau, des « stars » de la recherche mondiale, sur des « chaires internationales ». Nous mettrons sur la table un budget conséquent pour payer leur salaire et leur fournir un environnement stimulant.
Une coordination européenne se prépare-t-elle pour accueillir ces chercheurs et chercheuses ?
A.S. : À ce jour, l‘Europe est dans une phase de réflexion active pour financer des chercheurs et des chercheuses qui viendraient de pays hors Europe, par exemple en dopant les bourses Marie Curie. Par ailleurs, le Conseil européen de la recherche (ERC) a doublé, à 2 millions d’euros, l’enveloppe d’installation dans l’Union européenne donnée aux scientifiques lauréats d’une bourse ERC en provenance d’un pays tiers.
Que peut apporter le CNRS aux scientifiques étrangers ?
A.S. : L’offre, c’est l'attractivité de la recherche française. Aujourd’hui, un tiers des nouveaux entrants au CNRS ne sont pas Français et 90 nationalités sont représentées parmi nos 28 000 scientifiques. D’éminents scientifiques acceptent aussi de devenir fellow-ambassadeurs du CNRS chaque année, prouvant sa notoriété.
Pour les post-doctorats, nous ferons des offres compétitives en termes de salaire. Et les chaires de professeurs junior s’accompagnent également d’un accompagnement conséquent via l’Agence nationale de la recherche, qui permet au lauréat de constituer une équipe de qualité. Le CNRS donnera aux scientifiques étrangers brillants qui postuleront les moyens de développer en France les programmes de recherche qui sont aujourd’hui bloqués dans leur pays.