« La Mission Programmes nationaux du CNRS est un dispositif indispensable de coordination »
Afin de coordonner les programmes nationaux qui lui ont été confiés, notamment dans le cadre de France 2030, le CNRS lance une Mission dédiée, dirigée par Frédéric Villiéras et placée directement sous la responsabilité du Directeur général délégué à la science.
Vous venez d’être nommé directeur de la Mission programmes nationaux du CNRS. Quel sera le rôle de cette Mission ?
Frédéric Villiéras1
: Cette Mission est un dispositif indispensable pour coordonner les programmes nationaux dont le CNRS a la charge dans le cadre du plan d’investissement France 2030. Du fait de son caractère multidisciplinaire, l’organisme pilote ou copilote 31 Programmes et équipements prioritaires de recherche (PEPR) sur les 43 aujourd’hui2
lancés par le gouvernement, d’autres étant en attente de validation ou de sélection. C’est un rôle nouveau et important pour le CNRS comme pour les autres organismes auxquels l’État a souhaité confier le pilotage de tels grands programmes de recherche à visée nationale. À terme, la Mission programme nationaux intégrera dans la même dynamique de coordination non seulement les Programmes prioritaires de recherche (PPR) financés par le programme investissements d'avenir PIA3, mais aussi les autres programmes nationaux que le CNRS sera amené à piloter. Cette Mission est encore nouvelle et à construire : j’en précise petit à petit les enjeux et objectifs, et les interactions nécessaires avec les acteurs concernés pour les remplir.
- 1Géologue de formation, Frédéric Villiéras est directeur de recherche CNRS au Laboratoire interdisciplinaire des environnements continentaux (CNRS/Université de Lorraine). Il a contribué à la création de l’Observatoire des sciences de l’Univers OSU-OTELO, a piloté le LabEx Ressources21, et a été entre 2014 et 2022 vice-président du Conseil scientifique de l’Université de Lorraine en charge de la recherche, de la valorisation et du doctorat.
- 2À la date du 31/01/2023.
À savoir
Les programmes et équipements prioritaires de recherche (PEPR) sont de deux types : les PEPR de stratégie nationale d’accélération – qui accompagnent des transformations déjà engagées comme l’hydrogène décarboné ou l’intelligence artificielle (IA) – et les PEPR exploratoires – qui ont vocation à développer des secteurs émergents tels que le stockage de données sur ADN (MoleculArXiv) ou l’intégration des robots dans la société (O2R). Instillant une dose importante de démarche top-down, focalisant les acteurs sur des grands enjeux industriels et sociétaux, les PEPR d'accélération sont complémentaires aux PEPR exploratoires, dont les thématiques émanent du monde académique et qui sont sélectionnés par un jury international. Ces programmes sont opérés par l'Agence nationale de la recherche (ANR), notamment chargée de la sélection des PEPR exploratoires, et de la contractualisation et du suivi des projets de tous les PEPR.
En pratique, quels sont les objectifs principaux de cette Mission Programmes nationaux du CNRS ?
F. V. : Les programmes sont mis en œuvre par des directeurs et directrices de programme qui participent à l’animation au sein du CNRS et en particulier des 10 instituts de l’organisme. La Mission viendra coordonner l’action de ces personnes et sera en appui de leur démarche pour déployer les programmes via des dispositifs et outils communs mais adaptés à chaque PEPR. Tous proposent ainsi des projets ciblés – choisis sur la base de leur connaissance de la thématique et de l’écosystème académique national afin de choisir les bonnes cibles scientifiques et les bonnes équipes pour les atteindre –, ainsi que des appels à projets plus ouverts. En lien avec l’Agence nationale de la recherche (ANR) qui en est l’opérateur, il faut définir les modalités de ces appels, en suivre les réponses, travailler à la sélection avec un jury d’experts et d’expertes, etc. Autant de missions qui peuvent profiter d’un appui centralisé et du partage de bonnes pratiques pour ne pas tout réinventer à chaque appel de chaque programme, même si chacun garde les spécificités qui font la richesse des communautés de recherche. La même logique s’applique pour les ambitions des programmes en termes d’équipements, notamment au niveau des plateformes, mais aussi de management de projets, de communication scientifique et de valorisation et transfert technologique. Sur ces thèmes, la Mission animera les réseaux métiers associés pour permettre une vision globale et consolidée, à court et long termes, de l’ensemble des activités des programmes. Il faudra montrer le bon fonctionnement des programmes en lien avec les attentes de l’État et de la société, et d’ici quelques années coordonner leurs évaluations par l’ANR et le Secrétariat général pour l'investissement (SGPI) qui pilote le plan France 2030.
Comment la mission va-t-elle s’organiser pour remplir ces objectifs ?
F. V. : Nous allons rapidement finaliser l’équipe de la Mission pour laquelle je m’appuierai sur des adjointes et adjoints dans les trois réseaux métier de l’appui à l’administration et à l’animation des programmes nationaux, de la valorisation des travaux de recherche, et de la communication. Des recrutements sont en cours pour l’animation et administration, et pour la communication. Feriel Hamdi, responsable du pôle partenariats et financements prématuration à CNRS Innovation, nous appuie déjà sur l’aspect valorisation et transfert. Elle a porté la réponse du CNRS à l’appel à propositions prématuration-maturation France 2030 qui vient de rendre ses résultats. Le but de l’équipe est de travailler sur les objectifs et les bonnes pratiques à partager, d’animer les réseaux pour faire remonter les besoins, les sujets d’inquiétude, les idées et de développer les outils à disposition des équipes de pilotage des programmes. Parmi les outils de pilotage proposés aux directeurs et directrices de programme, la Mission aidera en particulier au recrutement des personnels en appui de chaque PEPR sur ces sujets qui sont de véritables enjeux pour les programmes et pour le CNRS. Il faut choisir les bonnes personnes pour être au rendez-vous avec le bon niveau d’ambitions.
Quel défi relèverez-vous en priorité ?
F. V. : Toutes nos démarches se penseront en collaboration avec les porteurs de programmes ainsi qu’avec les organismes qui assurent le copilotage avec le CNRS. Je travaillerai donc avec mes homologues dans les organismes de recherche partenaires qui en mettent en place, comme par exemple le CEA, l’Inserm, Inrae, Inria, de nombreux EPIC et des universités. L’Agence nationale de la recherche est aussi un partenaire et interlocuteur incontournable pour le conventionnement et le suivi des programmes. Ensemble, nous souhaitons trouver des méthodes et des outils qui facilitent le travail des directeurs et directrices de programmes. Par exemple, les principaux EPST et le CEA ont élaboré, à l’initiative du CNRS, un dispositif d’engagement des différents partenaires pour finaliser les accords de consortium rapides. Évidemment, les liens avec les instituts et les 18 délégations régionales du CNRS devront aussi être réguliers, ces dernières gérant les moyens financiers dédiés aux programmes et équipements prioritaires de recherche. Le partage d’informations sera clé pour aider les programmes au mieux, avec des solutions spécifiquement adaptées à chacun.