Un premier bilan de santé excellent pour l’instrument SuperCam a la surface de Mars
A la suite de l’atterrissage sur Mars du rover Perseverance de la NASA dans le cratère Jézéro le 18 février, les équipes opérationnelles du FOCSE (French Operations Centre for Science and Exploration) au Centre Spatial de Toulouse ont reçu les premières données qui attestent de la bonne santé de l’instrument SuperCam.
Situé à la tête du mât du rover Perseverance, SuperCam est actuellement soumis à une série de tests destinés à vérifier l’état de fonctionnement de tous les systèmes qu’il embarque. Cette phase de « recette », qui couvre l’ensemble du rover et de ses instruments, s’étendra sur plus de trois mois. Dès à présent, les données récoltées par les ingénieurs et scientifiques aux commandes de SuperCam livrent un bilan excellent de son état de santé général.
Véritable « couteau suisse » de la mission, SuperCam réunit cinq techniques de mesures destinées à étudier la géologie de Mars et aider à la sélection des échantillons que collectera le rover. Les données transmises par l’instrument montrent que toutes les fonctions sont opérationnelles :
La spectrométrie LIBS étudie la lumière d’un plasma formé par un faisceau laser infrarouge. Jusqu’à sept mètres de distance, elle donne accès à la composition élémentaire (atomique) des roches. Cette technique est utilisée avec succès par l’instrument ChemCam à bord de Curiosity depuis plus de huit ans. Les premiers spectres LIBS ont été acquis par SuperCam sur la cible Maaz, qui veut dire Mars en Navajo. Ils sont d’excellente qualité. En les confrontant à ceux obtenus par ChemCam, les scientifiques vont pouvoir comparer la chimie élémentaire à deux endroits différents de la planète.
La spectrométrie Raman utilise un faisceau laser vert pour l’analyse de la minéralogie des roches de Mars. Elle permet de caractériser précisément la structure moléculaire des minéraux jusqu’à sept mètres du rover, mais aussi de détecter certaines molécules organiques. « C’est la première fois qu’un instrument utilise le Raman ailleurs que sur Terre ! » s’enthousiasme Olivier Beyssac, directeur de recherche du CNRS à l’IMPMC. « La spectroscopie Raman va jouer un rôle crucial dans la caractérisation des minéraux permettant de mieux comprendre les conditions géologiques de leur formation et de détecter de potentielles molécules organiques et minéraux qui pourraient avoir été formés par le vivant ».
La spectrométrie de réflectance visible et proche infrarouge analyse la lumière du Soleil qui est réfléchie par les roches dans les domaines du visible et du proche infrarouge. Cette technique, déjà largement utilisée depuis l’orbite, permet de décrire la minéralogie des roches de Mars, en particulier leur évolution en présence d’eau, mais aussi les constituants de l’atmosphère. SuperCam exploite pour la première fois cette technique à la surface de Mars. Le premier spectre acquis sur Maaz est de très bonne qualité. Utilisée conjointement avec la LIBS qui a le pouvoir de dépoussiérer les surfaces rocheuses, la spectrométrie de réflectance visible et proche infrarouge va fournir des données très attendues par la communauté des spécialistes de Mars.
La caméra couleur prend des images à haute résolution qui sont utilisées pour comprendre le contexte géologique des cibles afin d’aider à l’interprétation des analyses biochimiques et minérales. Les premières images reçues présentent la qualité et la résolution attendues et indiquent que l’imageur est en parfait état de fonctionnement.
Le microphone scientifique enregistre le son engendré par l’impact laser du LIBS sur la roche jusqu'à une distance de quatre mètres. La formation du plasma s’accompagne en effet d’un claquement dont l’enregistrement fournit des informations sur les propriétés physiques des roches. Ce microphone peut également enregistrer le bruit du vent et les sons produits par le rover lui-même. « Les sons acquis sont d’une qualité remarquable ! » exulte Naomi Murdoch, enseignante chercheuse à l’ISAE-SUPAERO. « C’est incroyable de se dire que nous allons faire de la science avec les tout premiers sons enregistrés à la surface de Mars ! »
Rythmées depuis le Jet Propulsion Laboratory (JPL) à Pasadena (Californie), les opérations se poursuivent au FOCSE Mars 2020 du CNES, où l’équipe française partage ses activités avec celle du laboratoire national de Los Alamos (LANL, Nouveau Mexique). Tous les deux jours, les scientifiques et ingénieurs français passent les commandes à leurs homologues américains qui, à leur tour, se calent à l’heure martienne pour donner vie à ce concentré de technologie. « Nous tirons un grand bénéfice de notre expérience sur ChemCam dans nos activités et notre façon de collaborer avec nos homologues américains » explique Gabriel Pont, Manager des équipes opérationnelles de l’instrument SuperCam au FOCSE Mars 2020. « Malgré les restrictions sanitaires qui nous imposent beaucoup plus de distance, les opérations sont fluides et suivent un très bon rythme. »
Après cette première phase de vérification de la bonne santé des instruments, la NASA et le JPL vont poursuivre la vérification des fonctions de Perseverance puis de l’hélicoptère Ingenuity pendant encore au moins deux mois. Au terme de ces opérations de vérification, la mission scientifique de Perseverance commencera véritablement. Au FOCSE, les scientifiques de nombreux laboratoires du CNRS et de ses partenaires, ainsi que les ingénieurs des opérations du CNES se préparent à cette prochaine phase qui va durer plusieurs années.
La NASA s’appuie sur le Jet Propulsion Laboratory (JPL) du Caltech pour le développement de la mission Mars 2020. SuperCam a été développé conjointement par le LANL (Los Alamos National Laboratory, États-Unis) et un consortium de laboratoires rattachés au CNRS et à des universités et établissements de recherche français. Plusieurs universités espagnoles, emmenées par l’université de Valladolid, contribuent aussi à cet instrument. Le CNES est responsable, vis-à-vis de la NASA, de la contribution française à SuperCam.
Replay de la conférence de presse virtuel SuperCam